Les sociétés de gestion face au défi de la grande transmission de patrimoine des 20 prochaines années

Les sociétés de gestion doivent se réinventer pour affronter un bouleversement majeur qui est la grande transmission de patrimoine prévue entre 2030 et 2040. D’après le World Wealth Report 2025 publié par Capgemini, 83 500 milliards de dollars passeront d’une génération à une autre dans les vingt prochaines années. Ce changement massif entraînera l’émergence d’une nouvelle génération d’héritiers particuliers fortunés.

Des propositions d’investissements adaptées à la nouvelle génération

Face à cette grande transmission de patrimoine, le secteur de la gestion de fortune devra réinventer ses offres via des propositions d’investissement adaptées pour la nouvelle génération de particuliers fortunés. De plus, il est crucial d’équiper les conseillers et les clients des outils numériques ad hoc, et de tenir compte du lien important qui existe entre le conseiller et son client.  

Cette nouvelle clientèle sera principalement issue des générations X, Y et Z. Elle héritera selon trois phases. Ce sera 30 % d’ici fin 2030, 63 % d’ici fin 2035, et 84 % d’ici 2040. « La grande transmission de patrimoine sera un moment charnière pour le secteur » selon Kartik Ramakrishnan, CEO des services financiers chez Capgemini. Il souligne que 81 % des héritiers prévoient de changer de société de gestion dans les deux ans suivant l’héritage.

« La nouvelle génération de particuliers fortunés arrive avec des attentes très différentes de celles de leurs parents » poursuit l’analyste. « Les sociétés de gestion doivent également doter leurs conseillers de capacités numériques, potentiellement renforcées par l’IA générative ou agentique, afin de limiter les risques de perte de clients et de talents. »

Des services numériques avancés

Pour conserver ces clients, Capgemini préconise que les sociétés proposent des services alignés sur les attentes de cette génération. Elles devront intégrer des capacités numériques avancées, utiliser l’intelligence artificielle, et proposer une expérience fluide sur tous les canaux de communication.

Les sociétés de gestion devront également élargir leurs propositions d’investissement. Les particuliers fortunés consacraient déjà 15 % de leurs portefeuilles aux investissements alternatifs début 2025. Ce chiffre inclut le capital-investissement et les crypto-monnaies. Les générations Y et Z sont prêtes à prendre plus de risques. 61 % d’entre eux investissent dans des actifs à forte croissance ou dans des produits de niche.

Les conseillers observent une forte demande pour quatre types de services. Les actifs alternatifs tels que le Capital-investissement et les cryptomonnaies attirent 88 % des jeunes clients comparé aux baby-boomers.

Des hubs émergents mal couverts par certaines sociétés de gestion

Des hubs financiers émergents comme Singapour ou Dubaï séduisent par leurs avantages fiscaux. 50 % des conseillers estiment que leur manque de présence dans des hubs émergents comme Singapour, Hong Kong, les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite va les pénaliser face à ces clients qui recherchent de la diversification, de meilleurs retours sur investissements, et un environnement réglementaire favorable.

Les services personnalisés tels que les services de conciergerie avec des voyages de luxe, des soins médicaux et de la cybersécurité sont les services non financiers à valeur ajoutée les plus recherchés. Les conseillers placent les plateformes digitales, offrant une vue globale du patrimoine de leurs clients et des données exploitables, comme l’outil le plus important, suivi par l’automatisation intelligente des tâches opérationnelles tels que les comptes rendus de réunions et les e-mails.

Cependant, les conseillers eux-mêmes sont en tension. Un sur trois se dit freiné par le manque d’outils numériques. Un sur quatre prévoit de changer d’entreprise dans l’année à venir. Or 62 % des particuliers fortunés de nouvelle génération déclarent qu’ils suivraient leur conseiller s’il changeait de société. D’ici 2040, près de la moitié prévoit de partir à la retraite. Cette instabilité renforce la nécessité pour les sociétés de gestion d’investir dans la fidélisation de leurs conseillers.

Le nombre de millionnaires a augmenté de 2,6% dans le monde

Le rapport décrit enfin la situation actuelle des particuliers fortunés dans le monde. En 2024, leur nombre a progressé de 2,6 %, principalement grâce à la performance des marchés américains, de la performance des marchés boursiers et de l’optimisme autour de l’IA. Les États-Unis comptent désormais 7,9 millions de millionnaires, soit une hausse de 7,6 %. L’Inde et le Japon enregistrent chacun une croissance de 5,6 %. La Chine vit un recul de 1%.

L’Europe et le Moyen-Orient en revanche voient leur nombre de particuliers fortunés reculer de 2,1 %. La France perd 21 000 millionnaires, l’Allemagne 41 000 et le Royaume-Uni 14 000. Malgré ce recul global, la part des particuliers ultra fortunés pour sa part augmente de 3,5 % sur le continent, montrant une concentration croissante de la richesse. Le Moyen-Orient connaît un recul du fait de la baisse des prix du pétrole.

L’Amérique latine est la région la plus touchée par le recul du nombre de millionnaires avec une baisse de 8,5 %. Le Brésil et le Mexique accusent les plus fortes chutes, respectivement de 13,3 % et 13,5 %, en raison de l’instabilité budgétaire et de la dépréciation des devises. Les sociétés de gestion doivent donc agir rapidement. Elles doivent adapter leur stratégie à un monde où les attentes des héritiers, les technologies et les marchés évoluent en profondeur.